Far Cry 3 - La grande mascarade
Pour être franc, la première fois que j'ai lancé Far Cry 3, je m'attendais à vivre l'enfer. Entre les personnages psychopathes des trailers et l'encyclopédie du jeu sobrement intitulée Guide de Survie, l'expérience promettait d'être intense. Toutefois, prenant mon courage à deux mains, je cliquais quand même sur le mode de difficulté le plus élevé et fermais les yeux. Ça y est, me voici dans la peau de Jason, jeune californien venu avec ses amis chercher adrénaline et autres plaisirs de la vie sur une île paradisiaque. Vu que cette dernière foisonne de vendeurs d'esclaves et de kalachnikov, on se dit qu'ils ont dû passer par une agence de voyage un peu spéciale mais mettons.
Ce qui rend Jason sympathique c'est qu'il n'a rien d'exceptionnel. Il n'a jamais tenu une arme de sa vie, il n'a jamais fait d'opérations commandos en Afghanistan bref un vrai touriste lambda. Je sentais du coup qu'Ubisoft miserait sur un gameplay original avec un héros peureux voire maladroit. Mais les années passent et je reste un grand naïf. En effet, après s'être échappé de sa prison en bambous au moyen de QTE passionants, notre bleusaille rencontre un autochtone qui lui explique qu'un guerrier sommeille en lui et qu'il doit combattre puisque c'est son destin. Bon, quand c'est génétique, on ne peut que s'incliner. De fait en dix minutes montre en main, Jason maîtrise la machette, les fusils d'assaut et enchaîne les massacres de masse sans problème. A côté quand on voit le pauvre Jason Bourne passer des années de formation pour devenir un tueur ultime, on se dit que c'est un sacré rigolo. Bref, vous voilà parti pour une vendetta sanglante afin de libérer vos potes et offrir la victoire à la guérilla locale qui se bat depuis des années pour éliminer le méchant Vaas et ses sbires. C'est quand même autre chose que de partir en vacances avec le Club Med !
Ubisoft n'a pas été avare en promesses pour cet opus de Far Cry. Pour être clair, on est censé disposer d'un véritable bac à sable pour adulte. Monde ouvert, graphismes au top et thèmes matures devaient ainsi coexister dans ce FPS. Malheureusement, en dehors de la technique, le résultat est loin d'être à la hauteur. Il faut reconnaître que, pour peu qu'on ait une config un peu musclée, le jeu est très beau. Bien que le moteur physique ne fasse pas de prouesses, les textures sont propres, la jungle est superbe et la gestion des cycles jour / nuit est totalement maîtrisée. Ajoutez à cela une carte vaste et sans chargement et vous avez tous les ingrédients pour affirmer que ce titre a dû demander beaucoup de travail.
Mais un beau jeu dans lequel on s'ennuie reste un jeu moyen. Ce fameux monde ouvert nous propose évidemment son lot de quêtes secondaires répétitives à souhait. Libérer un avant-poste, faire des courses contre-la-montre en jet-ski, assassiner un chef de bande, autant de mini-jeux qu'on a l'impression d'avoir fait des centaines fois dans d'autres jeux. Le pire c'est que tout ça nuit à l'ambiance globale du jeu. Car livrer une caisse de médicaments en Jeep en traversant à fond de 5e des paysages enchanteurs s'accorde très mal avec la pseudo folie censée régner sur l'île. Celle-ci n'apparaît d'ailleurs furtivement qu'à travers les cinématiques de la quête principale. Le monde déchiré, violent voire glauque qu'on attendait n'est qu'un fantasme du marketing pour le coup. A aucun moment on ne se sent mal à l'aise et on finit par trouver la cohérence de l'ensemble très discutable. Ce Far Cry souffre d'un manque d'identité évident et on remarque rapidement que ce jeu est plus un pot-pourri d'autres FPS / jeux d'action qu'un projet pensé de A à Z. J'en veux pour preuve le système de la carte qu'on dévoile en escaladant les antennes de communication des méchants (on peut les appeler comme ça vu le manichéisme du jeu). Si ça ne vous rappelle pas Assassin's Creed ça (et non je ne parlerai pas du deltaplane qui est aussi un avatar d'AC2)...
Cela dit je reconnais volontiers qu'on joue rarement à un Far Cry pour son scénario mais plus pour l'expérience de shoot. Une fois de plus, attendez-vous à être déçu pour deux raisons majeurs : les armes ne procurent aucun feeling et l'IA est une catastrophe. On combat en permanence des pirates cumulant stupidité et cessité. En effet les ennemis ne vous détectent pas à plus de 5m et ce, quelle que soit la luminosité! Comme ils n'ont aucune technique de combat et n'utilisent jamais leur avantage du nombre, on enchaîne les kills comme un dieu. Je n'ose même pas imaginer à quoi ressemblent les combats dans les autres modes de difficulté... Le seul avantage c'est qu'on peut jouer à Far Cry 3 tout en étant au téléphone ou en train de consulter sa boîte mail, on remplira quand même les missions. C'est peut être ça finalement le FPS du XXIe siècle, un défouloir auquel on consacre juste un oeil et une demi-oreille. Bref déprimé par ces méchants sans doute trop imbibés d'alcool et de somnifères pour mener des guerres sérieuses, je m'en remets à la terrible faune locale pour trouver enfin du challenge. Mais le mal est plus profond que je ne le pensais sur l'île car nos amis tigres et requins sont tout aussi inoffensifs que leurs homologues humains. Deux cartouches de fusil à pompe, un coup de machette et me voilà devenu une nouvelle cible pour Brigitte Bardot. Il faudrait qu'ils se décident à envoyer un biologiste sur cette île pour comprendre le mal qui la frappe. Peut-être que la consanguinité est à l'origine de cette molesse et de cette stupidité ambiante, je ne sais pas...
J'en profite pour préciser qu'évidemment la version PC n'a bénéficié d'aucun soin. Checkpoints, inventaire et compétence accessibles via la touche Echap, Ubisoft Montréal prouve une fois de plus qu'ils n'ont aucun développeur habitué à jouer avec une souris et en clavier. Sans surprise, le gameplay console s'accorde bien avec un multijoueur console. Le versus est notamment un superbe hommage à Call of Duty donc si vous aimez les petites cartes, les perks, le camping et faire vos kills en tuant l'adversaire par derrière, Far Cry 3 devrait vous satisfaire! Quant au mode coopératif, il semble être plaqué là comme une obligation. Aucun rapport avec l'histoire principale, une fois de plus aucun challenge ou presque, on s'ennuie ferme. Mais comment vendre un jeu sans coop me direz-vous...
Arrive la fameuse question : est-ce que c'était mieux avant ? Comme je n'ai jamais vraiment accroché à cette licence, j'aurais du mal à l'affirmer. Far Cry 1 était plus révolutionnaire techniquement, le 2 plus travaillé au niveau de l'ambiance mais ce volet semble plus complet dans ce qu'il offre. Il reste à fuir malgré tout à moins d'aimer les jeux qui vous offrent la toute-puissance divine. Quand je vois que ce titre est unanimement salué par la presse dite spécialisée, j'en viens à citer pour la première fois de ma vie Call of Duty : The Future is Black mes amis...
A vous lire si vous avez eu l'occasion d'y jouer !
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